(Source "Ciels impériaux " de Vital-Ferry - page45/47 :

Afrique équatoriale française

[...] La première escadrille, née en 1930, est à effectif complet en 1932, avec Bangui, (parfois orthographié Banghi) comme base principale. Elle poursuit les voyages d'études entrepris sur les axes Bangui-Fort Lamy et Pointe Noire-Brazzaville, et effectue les reconnaissances préparatoires à l'implantation de terrains de secours. Ces missions commencent en décembre 1931 par un voyage de Bangui à Brazzaville. Du courrier est transporté durant cette période par des avions militaires car on a recensé des plis postés à Fort-Archambault le 3 février 1932 et arrivés à Fort-Lamy le lendemain 4.

Bloch 120 n°7 de l'aviation d'AU à Bangui ; remorquer la porte se levant de bas en haut, typique de la version militaire. Le gouverneur s'entretient avec un notable avant le départ. Dès l'arrivée du complément de dotation d'avions, une mission de reconnaissance des voies d'accès aux régions du Ouadaï, de I'Ennedi, du Borkou et du Tibesti, est lancée en liaison radio avec les stations nouvellement installées. Elle groupe deux sections, une de 2 Potez 25 TOE et un Potez 29 sanitaire en réserve à Fort-Lamy, une autre de 3 Potez 25 dont deux munis de radio. 1:ensemble quitte Bangui le 7 décembre 1932 pour Fort-Lamy après escale à Fort-Archambault. Le 10 décembre, le détachement actif couvre l'étape Fort Lamy-Ati puis arrive à Abécher le 11. Deux avions vont montrer les cocardes durant trois jours aux postes des groupes nomades, pendant que l'on répare le troisième, légèrement accidenté à l'arrivée. Les 17 et 18, le trajet Abécher-Biltine-Fada est couvert. Un vent de sable étant signalé, ce n'est que k 20 que la mission arrive à Faya, maintenant k contact radio durant toute sa progression. Le 22 elle part pour Zouar et y travaille les 4 jours suivants. Le 28 un vent de sable très violent maintient au sol les avions, qui rentrent enfin directement à Fort-Lamy k 29 et à Bangui le 4 janvier 1933. L' oeuvre accomplie durant cette période du 7 décembre 1932 au 4 janvier 1933, vaut à l'escadrille une citation donnant obtention de la médaille coloniale avec agrafe AFRIQUE ÉQUATORIALE FRANCAISE.

D'octobre 1933 à janvier 1934, trois équipages partent en mission de reconnaissance, en liaison avec un échelon terrestre, afin de compléter les cartes des confins nord et d'étudier les possibilités d'emploi d'un détachement aérien nomade, vivant entièrement sur ses propres moyens. À leur retour, les avions ont parcouru plus de 9.000 km dont 2/3 en région désertique. Ce déplacement, jugé important par les autorités, motive une mention spéciale au Journal Officiel (N° 270 de novembre 1934) dans un article premier ainsi rédigé :
Le droit a la médaille coloniale avec agrafe "Sahara' est acquis au personnel des formations aériennes de l'Afrique équatoriale française (détachement stationné à Fada) ayant participé à la mission de surveillance des confins nord pendant la période comprise entre le 3 octobre 1933 au 20 janvier 1934.

D'autres missions sont inscrites au palmarès de l'escadrille dont, en mars-avril, le transport, par deux équipages volant de conserve, du prince Bibesco, président de la Fédération Aéronautique Internationale (FAI) sur le trajet Fort-Lamy, Abécher, El Fasher, El Obeid, Khartoum, Abécher, Fort-Archambault, Bangui, Fort-Lamy, Kano.

En avril 1934, le gouverneur général du Congo belge, venu rendre visite à son homologue de l'AEF, est escorté par trois équipages de Bangui à Niamey. Durant ce mois, un autre détachement procède à des missions photographiques sur le fleuve Oubangui et Brazzaville tout en assurant les missions sanitaires. En mai l'escadrille explore un itinéraire pouvant servir à une liaison postale entre Bangui et Juba, sur le Nil Blanc, escale des hydravions d'Impérial Airways, en inaugurant l'itinéraire de Bangui à Zemio via Bambari et retour. Les équipages ont participé à l'escorte, de Bangui à Fort-Lamy, de l'avion du gouverneur général Alfassa allant saluer, en fin novembre, le passage à Fort-Lamy, des équipages de la « Croisière noire » de Vuillemin. Sur le chemin du retour, le gouverneur en profite pour aller inspecter par avion k district de Fort-Archambault en décembre. Au total pour l'année 1933 les avions de Bangui ont parcouru plus de 100.000 km sans incidents majeurs tout en assurant le transport postal.

Le prince Bibesco, président de la FAL revient en AEF en mars 1935, avec un Potez 56 portant l'immatriculation roumaine explicite Y R-FAI. Chargé d'une mission par le ministre de l'Air, il doit reconnaitre et étudier le tronçon sub-saharien de la future ligne France-Madagascar. Venu du Caire par Khartoum. El Obeid, El Facher, il pénètre en AEF à Adré et se pose à Abécher le 20 mars puis se dirige vers Fon-Lamy. Le 21 il va à Bangui subissant une tornade en cours de route, de volumineux nuages le forçant à voler au ras du fleuve Oubangui jusqu'à Bangui. Le 24 mars, il fait étape à Bangassou, puis retourne au Soudan anglais le 26 mars. pour aller vers Le Caire où se termine ce voyage le 2 avril 1935.

Les sanctions prises par le gouvernement à l'encontre des Italiens ne sont pas du goût de Mussolini qui revendique notamment une partie des confins tchadiens. Aussi une demi-escadrille est provisoirement détachée à Fon-Lamy et y accomplit des missions de découverte et de reconnaissance d'itinéraires, préparant des dépôts de carburant et balisant des terrains de secours dans le Nord. En 1938 deux Bloch 120, s'ajoutent aux 5 Potez 25. Puis un autre Bloch. le n°10, arrive à Bangui le 26 juin 1939, venant de Casablanca. [...]

(Source "Ciels impériaux " de Vital-Ferry - page45/47 :





















(Source "L'escadrille du désert" de Michel de Wailly - page116/117 :

1930 : la mission Gama, ou mission du Tibesti

[...] Les revendications italiennes sur le sud du Fezzan se font de plus en plus pressantes. Pour y répondre, le commandement décide de mener une nouvelle mission au-dessus des confins sahariens et du Tibesti.

Un détachement important - six Potez TOE - est placé dans cette intention aux ordres du commandant Gama, successeur de Bouscat à la tête de l'aéronautique de I'A.O.F. Deux appareils sont placés en réserve à Zinder, les autres constituant la mission elle-même. Ces quatre appareils sont pilotés par le commandant Gama, le capitaine Caissac, le lieutenant Jouhaud et l'adjudant Miette. Quatre sous-officiers mécaniciens les accompagnent. A l'aube du 12 novembre, les quatre Potez décollent de N'Guigmi pour Bilma : 390 kilomètres, 3 heures 30 de vol. Une brume de sable rend la visibilité médiocre et, à 2.000 mètres d'altitude, les détails du sol ne sont pas vraiment apparents. Pas au point, bien sûr, de rater Agadem!

Pourtant, les heures passent au-dessus d'un sable uniforme. Les yeux fixés sur l'horizon espèrent repérer la falaise du Kaouar, mais, dans la grisaille brumeuse, rien n'apparaît. Chaque irrégularité est un espoir déçu. Au-dessous, le terrain change : le sable uni alterne avec des plateaux caillouteux.

Il y a cinq heures maintenant que les avions ont décollé et ils ont parcouru 700 kilomètres. La décision s'impose : le commandant Gama se pose sur un reg. Le capitaine Caissac le suit, mais son avion pique du nez sur une petite dune et se brise. Les autres atterrissent bien. Réunis autour de leur chef, tous donnent leur avis sur l'endroit où l'on est. En fait, personne n'est sûr de soi : la mission est perdue. En transvasant l'essence de l'avion cassé, on gagnera une heure de vol, c'est déjà ça. Le 13, avant l'aube, tous sont sur pied pour reconnaître une bande de décollage. Les avions sont allégés, en particulier de quelques kilos de poissons du Tchad qui intrigueront tin jour un géologue attentif. Le décollage s'effectue néanmoins en surcharge puisque chaque appareil emporte un passager de trop.

L'envol a lieu normalement. On met cap à l'est-nord-est +ans identifier le terrain. Le sol devient de plus en plus rocheux. A l'horizon, des montagnes importantes se profilent : c'est le Tibesti. La mission mesure alors l'ampleur de l'erreur commise. Il est trop tard pour la réparer : l'essence s'épuise et il faut, comme la veille, atterrir en détresse.
Aucun membre de la mission ne se fait d'illusion : Bilma ne pourra jamais, avec ses méharistes, balayer un pays mesurant plusieurs centaines de kilomètres. Pourtant, le commandant Gama a le sens du désert : en 1924, il a réalisé la première liaison aérienne Gao-Colomb-Béchar. Il donne ses ordres : inventaire de l'eau et des vivres. Avec l'eau des radiateurs, la mission dispose d'une réserve pour trois semaines.

La situation n'est donc pas sans espoir et le campement s'organise. On s'apprête à rester longtemps. C'est alors que survient une chose étonnante, là-bas, à l'horizon: des silhouettes de méharistes ! [...]

(Source "L'escadrille du désert" de Michel de Wailly - page116/117 :